14.8.14

Les galeries

Au début, je ne savais rien du monde de l'art, je n'y connaissais rien. Je suis devenue une artiste, comme ça, simplement en suivant mon instinct. Il y a quelques années, je peignais par terre dans mon p'tit loft de l'ouest de l'île. Une idée m'est venue et à ce moment, j'ai réservé une galerie... enfin, je dirais plutôt, un lieu d'exposition moyennant une somme importante. Exposer mes œuvres pour la première fois valait le coût. Je me disais ''ce sera un moment mémorable, le début d'un nouveau chapitre''. Je trouvais l'idée folle, mais, moi, j'aime les idées folles. À cette époque, je ne connaissais pas le monde des galeries d'art. J’entendais certaines personnes dire que les galeristes étaient des gens gourmands voire ''crosseurs'' en se prenant une quote minimale de 50%. À ce moment, novice et naïve comme j'étais, je n'avais encore pas d'opinion là-dessus.

Le temps passa et mes expositions solos se sont multipliées. Je passais énormément de temps à travailler dans mon atelier à la réalisation de nouvelles œuvres à exposer. Je passais énormément de temps à organiser mes vernissages (le vin, les bouchées, la musique, l'ambiance). Je passais énormément de temps sur mon laptop à peaufiner mon site web, ma page facebook, ma démarche artistique, mes documents de promotions, mes cartons d'invitation, mes cartes d'affaires, mes ti-cartons avec mes prix dessus, mes books, mes calendriers, mes ti-chevalets, name it! Je passais énormément de temps à rechercher des endroits pour exposer, à participer à des appels d'offre, à des concours, à sélectionner ce qui est bon pour un artiste versus ce qui n'est pas bon. Etc. Avec le temps et les expériences, mon opinion quant aux galeries d'art s'est un peu clarifiée.

Je comprenais un peu mieux leur rémunération de 50% qui est, à mon avis, un pourcentage honnête et raisonnable, compte tenu du travail qu'ils font. Il faut se le dire, un artiste ne peut pas passer sa vie à porter tous les chapeaux (créateurs, promoteur, vendeur, comptable...) il se doit de déléguer avant de s'essouffler. Les galeristes, en plus d'offrir de la crédibilité au travail de l'artiste qui émerge, sont aussi là pour accomplir une grande partie du travail de promotion et de vente. À mon avis, les galeristes qui font bien leur travail méritent leur 50%! Je voulais donc, dès lors, être représentée par une galerie. Hé, Hé, Hé, Wo, Wo Wo-là.... Ce n'est pas si simple que ça d'être représenté par une galerie. Les galeries sont sur-sollicitées et rares sont les artistes qui arrivent à se dénicher une petite place dans ces lieux fortement prisés.

Entrer en galerie est une étape importante dans la carrière d'un artiste. C'est donc vraiment stressant de s'y rendre pour rencontrer la personne concernée dans le but de tenter de ''booker'' un rendez-vous et de lui présenter son travail. J'ai donc pris mon temps avant de franchir cette étape! J'ai continué à travailler fort, j'ai développé certaines techniques artistiques, j'ai vu une évolution dans mon travail. J'ai vu grand et j'ai conçu une collection sur bois originale et avant-gardiste. Cette collection, je suis même allée la présenter à New-york. Les critiques de NYC ayant été fabuleuses, à mon retour, je me suis dis : ''Ok là, je suis prête pour aller courtiser une galerie''. J'ai pris un temps fou pour sélectionner la galerie en question, car on ne choisi pas notre première galerie comme on choisi sa saveur de crème glacée à la crèmerie du coin! On ne s'y rend pas non plus les mains vides vêtu de bermudas et d'un T-shirt défraîchit! Non non non! Il faut qu'il y ait un sens à cette démarche. Il faut, en plus d'attirer l'attention du galeriste, avoir du talent, du charisme, de l'audace, etc. Il faut aussi tomber sur une bonne journée (pas de décès, pas de tickets, pas de spm...), il faut aussi que notre art puisse se marier aux œuvres exposées des autres artistes, etc.

Après quelques visites en galerie, mon choix était fait! J'avais choisi l'heureuse-élue! Un après-midi de juillet, je me suis rendue à la galerie minutieusement sélectionnée. Je respirais vite et j'avais les mains tremblotantes. Une fois arrivée sur le seuil de la porte, j'ai pris une profonde respiration et je suis entrée. Je me suis présentée à la dame qui se trouvait à la réception et après un court discours nerveux et maladroit, je lui ai proposé de regarder mes books pour qu'elle puisse avoir une meilleure idée de mon travail. Elle m'a regardé en me disant qu'elle était très occupée (dans une galerie vide) et qu'elle manquait de temps. En somme, ce n'était VRAIMENT pas le bon moment. Elle me proposa de lui laisser mes books et de repasser les récupérer dans un mois, et ce, en précisant qu'un comité de sélection allait se réunir prochainement pour faire le choix de nouveaux artistes. Je lui ai donc laissé mes books et c'est sans lui serrer la main (trop nerveuse) que j'ai quitté les lieux. Je n'étais pas si fière de ma performance toutefois, je refusais de m'en vouloir. C'était, après tout, ma seule et première expérience dans ce genre!

Les semaines ont passé et, moi, je me préparais tranquillement à récupérer mes livres à la galerie anticipant un refus. Tout à coup, le téléphone sonna. ''Bonjour madame, je vous téléphone de la galerie et nous serions intéressés à venir voir votre travail, le propriétaire de la galerie ainsi qu'une directrice artistique et moi-même, est-ce que nous pourrions vous rencontrer disons, jeudi prochain?''. Et moi, folle comme un balais je réponds : ''sans problème, je vous attendrai jeudi matin prochain'' en lui laissant mon adresse. J'étais tellement heureuse de ce rendez-vous, j'avais si hâte. Je pourrais comparer cela à la joie qu'éprouve un enfant lorsqu'on lui annonce que les billets pour Walt Disney sont finalement achetés! La veille du rendez-vous, la dame de la galerie me téléphona pour m'annoncer qu'il y a un empêchement et que le rendez-vous du lendemain sera annulé, mais remis à la semaine suivante, même heure. Déception. Toutefois, des empêchements, ça arrive et on n'y peut rien alors je tiens bon, la vie est belle!

La semaine suivante, même chose, le cirque se répète! La veille du rendez-vous, le téléphone sonne et encore une fois, on annule le rendez-vous du lendemain. - Déception + + + -
Un peu honteuse, la dame m'explique que le rendez-vous n'est pas annulé et qu'ils tiennent vraiment à me rencontrer. Elle me dit aussi qu'elle va s’asseoir cette semaine avec le propriétaire de la galerie pour s'assurer d'un moment de rencontre et ainsi, éviter d'annuler une troisième fois. Je lui ai fait part de ma déception et je lui ai demandé: ''quand dois-je m'attendre à avoir des nouvelles de votre part?'' et elle me répond : ''d'ici une semaine''.

Aujourd'hui, ça fait une semaine et demie et toujours pas de nouvelles... Dois-je croire que je n'irai pas à Walt Disney? Est-ce que cela veut dire que les billets d'avion n'ont jamais été achetés? Dois-je plutôt insister pour prendre l'avion même si on m'a oubliée dans le porte-bagages?

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